Depuis le début du confinement, l’espace autogéré des tanneries est devenu un espace de stockage et de redistribution de colis alimentaire.
La crise sanitaire du coronavirus est venue à amplifier la crise sociale ancrée depuis longtemps, créant de nouvelles situations de précarité à la fois économiques, affectives et psychiques. Cette crise semble faire taire soudainement une colère qui grondait, une agitation qui se répandait dans tout le pays, de la vague féministe au soulèvement des gilets jaunes, des grèves contre la réforme des retraites aux débrayages des travailleur-euses Uber. Tout le monde se retrouve confiné chez soi, brutalement coupé de ses moyens de luttes habituels, de cet élan collectif qui nous portait : impossible de prendre la rue, de se rencontrer pour s’organiser, de se toucher, de manifester, d’occuper collectivement l’espace public, de créer du commun.
Aux Tanneries, nous sommes un collectif de personnes attachées à ce lieux qui avons décidé de nous confiner ensemble, ici, dans l’espoir de pouvoir continuer à imaginer des manières d’agir, de moyens d’avoir une prise sur la situation que nous traversons.
Nous nous sommes donc organisés pour faire ce que ce lieu permet, pour qu’il continue d’être un espace politique d’auto-organisation, pour essayer d’activer le réseau de solidarité qui s’est construit depuis 20 ans ici. Nous avons donc mis en place un système de stockage et de redistribution de colis alimentaire, afin de fournir des produits de premières nécessité dans et autour de Dijon, à des personnes déjà précaires avant le confinement ou pour celles et ceux qui doivent affronter de nouvelles difficultés.
Nous livrons ainsi des colis à des familles dont le revenu se retrouve amputé des quelques mission d’intérim qui leur permettaient de joindre les deux bouts, à des étudiantes précaires, à des mineurs isolés, qui disposaient avant le confinement de réseau de solidarité qui ne fonctionne plus aujourd’hui, aux personnes migrantes ou encore à des personnes vulnérables devant la maladie…
Nous nous organisons aujourd’hui avec de nombreux collectifs (La Mistoufle, le quartier libre des lentillères…) et dijonnais.es pour que les colis arrivent remplis et soient livrés au domicile de ceulleux qui nous sollicitent. Nous distribuons de la nourriture et des produits d’hygiène à plus de 250 personnes et les demandes continuent d’affluer. La solidarité vient de toute part. Des associations et des paroisses nous lèguent leurs stocks de nourriture, des particulier.es viennent chaque fin de journée déposer des dons aux Tanneries, des agriculteurs nous fournissent des pommes de terres en grande quantité. Même confinés, la solidarité s’organise, dans la mesure de ce qui est possible avec les gestes nécessaires pour ne pas propager ce virus qui nous enferme.
Nous ne savons pas quel va être le futur, mais nous essayons de garder une prise sur le présent, de prendre soin de nos liens et de ne pas nous replier sur nous même.
Pour continuer ces distributions, nous avons besoin d’argent. Nous devons faire tourner les véhicules qui livrent, acheter des denrées supplémentaires, payer les factures. Plus le confinement dure, plus les demandes affluent. Et nos moyens ne sont plus extensibles.
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